WHITE EYES
Réf : Tri 005
Même aplaties sur le papier
dans une encre uniforme
même striées régulièrement
par les fuseaux du planisphère
l'orbe offre le mystérieux
des mers aux voiles prises
aux vents de voix qu'on veut
attribuer à l'un de l'inconnu -
autour de la flûte d'un faune
un cercle incarne pauvrement
l'espace à découvrir et place
à l'aube musiciennes les étoiles
d'une nuit de grenouilles
sous la lune encore à venir.
Pierre Vinclair
Isabelle Duthoit : voix, clarinette
Daniel Lifermann : flûte shakuhachi
Thierry Waziniak : percussions
Yukako Matsui : calligraphie live
Texte poésie : Pierre Vinclair
Design graphique : Baptiste Vayer
Mixage mastering : Pascal Bréchet
Enregistré live à l'Horloge France 2019
(remerciements à Alfredo Fiale et son équipe
Crédits photo Catherine Nardin/Peter Gannushkin/Baptiste Vayer
PRESSE
WHITE EYES (Intrication Label, Tri 005) : Un poème du poète orienté vers le lever du soleil Pierre Vinclair (La Sauvagerie, L'Éducation géographique), action painting calligraphique de Yukako Matsui. Et en plus, 7 moments, 7 vues qui évoquent un Japon imaginaire, par Daniel Lifermann, le fondateur de 'La Voie du Bambou', au shakuhachi et Thierry Waziniak aux percussions, familiers du Cercle, ainsi qu'Isabelle Duthoit, la compagne de jeu de Waziniak dans DWBH - Don't Worry Be Happy, avec sa voix & sa clarinette. Le jeu de Waziniak avec la pianiste franco-japonaise Masaé Gimbayashi ou avec Yoko Miura laisse tout au plus discrètement supposer que sa sensibilité, déployée avec Gaël Mevel, le Trio Rives, le Quartet Alta, le Duo Libertaire, s'accompagne parfois d'un tendre penchant pour l'esthétique extrême-orientale. En fin de compte, les étoiles brillent ici et là, et la même lune brille sur les grenouilles et les musiciens. Les sons de la flûte, les sons grésillants, les sons stridents et les sons gutturaux, les sons qui croassent, les reflets métalliques et les battements parcimonieusement tockés nous conduisent vers une faune étrange. Duthoit alterne entre un bec croassant et un museau haletant et grondant, des cordes vocales grinçantes, animales et monstrueuses, Waziniak gonfle, claque, s'agite ou tonne métalliquement, seul le shakuhachi tient fermement à la civilisation, en moine zen à la tête de clown blanc. D siffle entre ses dents, bourdonne comme un ours, émet des sons de bois de hirondelle et de chimère, sonne brièvement plus oiseau de nuit que la flûte girante, mais change à nouveau de rôle, bourdonne comme un grillon, s'agite avec la clarinette, W tinte et cliquette, manie comme un chaudronnier, s'agite avec le tabla. Comme l'horreur ukiyo-e se mêle au grotesque artaudesque et au devenir animal de Deleuze/Guattari, le Japon devrait se montrer sous son jour le plus abyssal pour correspondre à cette image. En dernier lieu, W danse et trépigne sur des tôles de tonnerre, D bouillonne, souffle et fume, quelque chose de barbare est en marche, car le 'souffle de la sagesse' de Seisoku Lifermann s'est tu.
Bad Alchemy - Rigobert Dittmann - Allemagne
"Nouvelle livraison étonnante d’Intrication, le label du percussionniste Thierry Waziniak, un batteur de jazz contemporain ouvert à toutes les aventures sonores sans slogan, parti-pris et prises de tête. Quatre artistes sensibles et subtils s’associent pour un projet audacieux qui défie le tout-venant, l’average improvised music, la musique improvisée « standard » quasi répertoriée, lingua franca de ma musique instantanée. Dans ce quatuor improbable où la voix extraordinaire, « torturée », extrême d’Isabelle Duthoit, en est le dénominateur le plus chargé de mystère et de « folie » : vibrations du larynx, voix de gorge surréelle, cris déchirants, consonnes fragmentées, sussurements de serpent à sonette, voyelles tourmentées, fins gloussements saccadés ou filet de sifflement, bruits machiniques, grondements d’outre-tombe. Face à ce phénomène paranormal, le souffleur de shakuhachi (une flûte japonaise en bambou percée de cinq trous), Daniel Lifermann, convoque les esprits en étirant les notes d’un son pur et cristallin, soutenant une note fantôme alors que la voix d’outre-tombe bruisse dans un grave forcené ou articule les borborygmes qu’on croirait être faits de chair, effrayant tous les crapauds du voisinage. Ailleurs, la voix lézardée et distendue de la chanteuse, qu’on entend aussi à la clarinette, et la flûte japonaise avec ses effets de souffle s’allient dans une entente magique comme le feraient des chamans dans un quelconque recoin d’un Altaï imaginaire. À cette conférence à deux voix d’un autre type, s’insèrent les interventions percussives minimales et colorées de Thierry Waziniak, métaux tintinnabulants ou frottés à l’archet, accessoires en bois qui résonnent comme des noix des antipodes. Ou encore percute comme un devin Sakha en transe. Et une quatrième partenaire distille son message invisible, mais perceptible en filigrane : Yukako Matsui s’applique à la calligraphie (japonaise) en « direct » , traçant noir sur blanc sur un parchemin d’un autre âge, éternel celui-là, des signes qui expriment sa perception des sons et des sens au creux de cette aventure sonore. J'ajoute encore qu'une telle flûte,le shakuhachi, se joue sans bec, ni embouchure métallique : l'air est vibré et le tuyau résonne par la grâce du souffle qui fait siffler une entaille au sommet du tube de bambou laissé ouvert. Instrument simplissime et très difficile à manier. Au fil des plages, l’inventivité sonore enfle, se dévide et fascine. Une musique aussi spirituelle qu’organique qui sublime et transcende magnifiquement la démarche musicale et scénique de chacun, aventurier des sons, avec un respect mutuel et une saveur dans les échanges et leur coexistence amoureuse dans un seul temps, celui de l’improvisation véritable, partage collectif de sons métamorphosés en expressions de vies. Sept improvisations : Seven Eyes , les yeux des voyants qui écoutent avec leurs corps. Une magnifique réussite qui dépasse largement le talent individuel dans une totalité intime et inespérée."
Jean - Michel Van Schouwburg - orynx-improvandsounds.blogspot.com Belgique